La croissance éphémère pendant la pandémie aurait donné de faux espoirs à Microsoft
Les licenciements massifs à l'échelle de l'industrie technologique se poursuivent. En 2023, les licenciements ont à nouveau coûté leur emploi à des dizaines de milliers de travailleurs du secteur technologique. Cette année, les réductions d'effectifs sont le fait des plus grands noms de la technologie tels que Google, Amazon, Microsoft, Yahoo, Meta et Zoom. Les startups ont également annoncé des réductions d'effectifs dans tous les secteurs. Certaines sources - dont Layoffs.fyi qui compile les données liées aux licenciements depuis la pandémie de la Covid-19 - estiment à plus de 550 000 le nombre de licenciements dans le secteur entre janvier et août 2023.
Dans le cas de Microsoft, un employé a récemment estimé que le géant de Redmond a licencié plus de 20 000 (ce chiffre n'est pas vérifié) personnes depuis l'année dernière. Dans un billet sur la plateforme communautaire Blind, qui regroupe les employés vérifiés d'entreprises du monde entier, il a expliqué comment Microsoft s'est retrouvée dans cette situation en tablant sur des prévisions folles liées à une croissance éphémère pendant la pandémie. Pour rappel, la crise sanitaire a déclenché une expérience sans précédent de télétravail dans le monde, une situation inédite qui a stimulé à des niveaux records les ventes des produits et services informatiques.
Pendant cette période, il y a eu une augmentation de la demande pour les PC, les services cloud, les logiciels de collaboration à distance et de visioconférence, et la main-d'œuvre. Les entreprises telles que Microsoft ont vu leurs bénéfices s'envoler et ont embauché des milliers de personnes dans le but de répondre à la demande sans cesse croissance. En outre, les données ont également révélé que la productivité des travailleurs a augmenté pendant la pandémie, jusqu'à 8 heures par semaine selon certaines études. Microsoft aurait décidé de surfer sur la vague et en tirer le maximum de profit, ce qui' l'a conduit à faire des prévisions de croissances folles.
À en croire le narrateur, anonyme, certaines des prévisions faites par Microsoft n'étaient basées sur aucun chiffre concret. Il a écrit : « nos ventes ont grimpé en flèche durant la pandémie, à l'instar de l'ensemble du secteur. Les cadres et les départements financiers faisaient des projections de croissance optimistes. La situation s'est rapidement transformée en une affaire de singe qui voit du singe qui fait du singe dans l'ensemble de l'industrie des logiciels. Tout le monde faisait des prévisions de croissance optimistes. On pouvait lire des chiffres insensés comme 30 à 40 % de croissance pour certaines entreprises et organisations pour les années à venir ».
Les cadres de Microsoft auraient manqué d'objectivité sur la croissance liée à la Covid
Selon le narrateur, durant cette période de vache à lait, peu de dirigeants ont fait preuve de clairvoyance ou de scepticisme. En outre, il estime que très peu parmi eux se sont demandé si la croissance était circonstancielle ou s'étalera sur une longue période. « C'était un moment critique. Des dirigeants ont eu la clairvoyance de voir que ces prévisions de croissance n'étaient pas viables. Malheureusement, les voix exprimant le scepticisme étaient peu nombreuses et noyées dans le grand bruit des dirigeants cherchant à bâtir des empires et des membres des équipes de vente qui bavent sur les implications pour leurs attributions d'actions », a-t-il écrit.
Il affirme que les dirigeants de Microsoft sont à l'origine de décisions fatidiques qui ont conduit aux licenciements massifs. « Tout le monde dans l'industrie (sauf Apple) le faisait et personne ne voulait aller à l'encontre de la sagesse collective. L'endettement pour financer les choses était vraiment bon marché (en particulier dans le cas de Microsoft en raison de notre notation obligataire) et les entreprises technologiques ont commencé à embaucher et à collectionner les employés comme des cartes Pokémon. Le décor était planté. Les châteaux de rêve des projections de revenus à la hausse étaient construits sur des hypothèses erronées », a-t-il déclaré.
Les voix discordantes se sont perdues dans le chœur collectif des cadres avides qui rêvaient de valorisations boursières élevées. Selon le billet, le conseil d'administration a discuté de la possibilité que ces prévisions ne se réalisent pas. Le consensus le plus large était qu'il y aurait beaucoup à perdre si ces prévisions se réalisaient et que Microsoft n'était pas préparée et ne disposait pas des ressources nécessaires pour saisir l'occasion. Ils pensaient que la demande durerait beaucoup plus longtemps et que la réduction serait progressive. Des discussions similaires auraient eu lieu dans les salles de conseil d'administration des grandes entreprises technologiques.
Cependant, toutes ces prévisions se sont subitement effondrées lorsque la pandémie a commencé à reculer. La demande des produits et services a chuté en un temps record en raison des ordres de retour au bureau, l'économie mondiale a ralenti et les entreprises technologiques ont eu des difficultés à faire face aux coûts. Selon le billet, fin 2022, Microsoft a pris la décision de réduire considérablement ses effectifs sur la base de trois facteurs : l'augmentation des coûts d'embauche et de rétention, l'avènement de l'IA générative (et les investissements massifs dans OpenAI) et la baisse des ventes de PC, des consoles Xbox et d'autres équipements.
Les entreprises justifient les licenciements par la situation macroéconomique actuelle
Le marché de l'embauche était en plein essor pendant la pandémie. Mais les choses sont devenues compliquées pour les entreprises technologiques au début de l'année dernière. En effet, les entreprises ont proposé des offres alléchantes pour attirer les talents durant cette période. Les attributions d'actions et les primes à la signature augmentaient à un rythme alarmant. Mais ces conditions d'embauche étaient devenues intenables en raison du ralentissement économique qui a suivi la pandémie. Le billet indique également que les investisseurs, en particulier Wall Street, se sont prononcés contre la dilution des actions pour soutenir l'embauche et la fidélisation.
Les principaux gestionnaires de fonds et actionnaires de Wall Street auraient alors commencé à faire pression sur les entreprises pour qu'elles augmentent les salaires et à promouvoir les licenciements massifs. Le rapport indique que les fonds spéculatifs ont proposé de licencier jusqu'à 500 000 employés de la technologie sur une année pour mettre une pression sérieuse sur la croissance des salaires. Selon l'auteur du rapport, c'est le premier facteur qui a motivé les licenciements. Notons qu'en plus du gel des embauches et le licenciement de plus de 20 000 personnes, Microsoft a annoncé qu'elle n’augmentera pas cette année les salaires travailleurs.
Selon le billet, le deuxième facteur qui a motivé les licenciements massifs chez Microsoft est l'IA. Le billet indique qu'après que le PDG Satya Nadella et d'autres cadres ont assisté fin 2022 à la démonstration des capacités de la technologie d'IA d'OpenAI, ils ont tout de suite pris la décision de ne pas laisser cette technologie leur échapper. Selon eux, la technologie d'OpenAI pourrait augmenter la productivité des développeurs et pourrait devenir la prochaine vache à lait de l'entreprise. Bien que Microsoft ait passé plusieurs années à mettre en place sa propre équipe d'IA, elle s'est résolue à investir massivement dans la technologie qu'OpenAI développe.
Ainsi, Microsoft pouvait se concentrer sur l'infrastructure nécessaire au développement de l'IA, notamment Azure, et laisser OpenAI développer le produit. Microsoft a investi plusieurs milliards de dollars dans OpenAI au début de cette année, mais le montant exact n'a pas été révélé. Elle avait déjà investi un milliard de dollars dans la startup d'IA en 2019. Bien sûr, l'augmentation des investissements dans le développement de l'IA et l'infrastructure adéquate (Azure) a entraîné une réduction des allocations dans d'autres domaines. Des équipes entières ont été licenciées. Selon le rapport, Satya aime à dire qu'il est nécessaire d'améliorer l'efficacité.
Certains hauts cadres feraient preuve d'un manque d'empathie envers les employés
Le dernier clou du cercueil : les ventes de PC et des consoles Xbox ont chuté à un rythme alarmant. Les prévisions de recettes pour d'autres activités se sont révélées erronées. « Un schéma clair s'est dessiné à partir d'août 2022. Fin septembre, les cadres avaient déjà donné leur feu vert aux licenciements et nous avons commencé à embaucher du personnel de soutien en ressources humaines, tandis que les plans de licenciements massifs se mettaient en place. Il était devenu tout à fait clair que nous avions largement trop de personnel pour faire face à la nouvelle réalité. En octobre, la portée des licenciements était déjà connue », indique le rapport.
L'auteur s'est plaint du comportement de certains dirigeants face aux situations difficiles que les employés touchés par les licenciements pouvaient vivre. « Inquiets du message que cela enverrait, certains dirigeants ont même limité les invitations aux fêtes de fin d'année. J'ai assisté à l'une de ces fêtes et j'ai été choqué par l'absence totale d'empathie pour le nombre de vies qu'ils sont sur le point d'impacter négativement. J'aimerais pouvoir vous dire à quel point certains dirigeants se soucient peu de leurs employés. Aujourd'hui encore, j'ai la nausée lorsque j'y pense et que ces images me reviennent à l'esprit », a écrit l'auteur dans son billet de blogue.
Le motif avancé pour justifier ces réductions d'effectifs suit un scénario commun, citant l'environnement macroéconomique et la nécessité de trouver une discipline sur un chemin tumultueux vers la rentabilité. Cependant, l'auteur du billet affirme que des dirigeants tels que Nadella ont manqué de "sincérité" envers leurs employés et ont commis des actes non conformes à la morale et à l'éthique qu'ils promeuvent : « c'est la troisième fois que je perds le respect de Satya Nadella en tant que dirigeant. La première fois, c'est à cause de la façon dont il a géré le flux constant de plaintes pour harcèlement sexuel déposées par des femmes dans toute l'entreprise ».
« Les preuves étaient accablantes, mais l'entreprise a tardé à réagir. Elle a abrité et protégé plusieurs cadres et a même payé leurs frais d'avocat. Deuxièmement, la façon dont il a traité les plaintes de corruption et de pots-de-vin pour l'obtention de contrats par Microsoft dans le monde entier. Troisièmement, la façon dont il a choisi de gérer ces licenciements. En tant qu'immigré et père de famille, je pensais qu'il aurait un peu plus d'empathie pour déraciner la vie des gens à cette échelle. Sans parler de la responsabilité de ses actes, il a demandé une augmentation alors que tous les problèmes que je viens de mentionner sont toujours d'actualité ».
Pour l'auteur, il s'agit d'un "échec moral". « Nous disposons à présent d'un appareil perfectionné de relations publiques et de ressources humaines pour gérer cette situation. Je considère qu'il s'agit d'un énorme échec moral. Ce n'est qu'une question de chiffres, mesdames et messieurs, et n'oubliez pas de vous en souvenir lorsque le marché s'améliorera bientôt. Il n'y a pas d'empathie ici », a-t-il conclu.
Source : billet de blogue
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Comment l'entreprise a-t-elle manqué d'objectivité et mal évalué cette croissance éphémère ?
Est-ce la faute de la cupidité ? Ou à des décideurs qui ont fait de mauvaises prévisions ?
Les dirigeants de Microsoft devraient-ils rendre compte de leur gestion pendant la pandémie ?
Que pensez-vous de la manière dont Microsoft a procédé aux licenciements massifs ?
Que pensez-vous du comportement général des entreprises technologiques durant la pandémie ?
La cupidité a-t-elle pris le dessus à ce moment ? Peut-on dire que les travailleurs licenciés ont été lésés ?
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